Quel bel animal !
− Qu'il est beau, qu'il est beau cet «animaux» ! Qu'il est beau, qu'il est beau cet «animaux !» chantonnait gaiement la fillette.
Comme tous les enfants de son âge, elle sautillait dans tous les sens et, bien trop occupée à profiter du spectacle, elle faisait la sourde oreille lorsque sa mère parlait. Celle-ci, agacée, lui répéta à plusieurs reprises :
− Non Lola. On ne dit pas «un animaux», mais un animal.
Pour la première fois depuis le début de la visite, la petite fille lui répondit :
− Oui je sais, mais ça ne rime pas avec «beau».
− On n'invente pas de mots, répliqua-t-elle sèchement.
La petite fille, vexée, s'en alla faire la tête auprès d'une cage occupée par un petit fauve. La finesse de son corps lui donnait l'apparence d'un lionceau d'à peine quinze jours. Le voyant chanceler sur ses pattes fragiles et tremblantes, Lola devina qu’il devait être en train de faire ses premiers pas. La fillette, émerveillée, décida d’immortaliser cette scène émouvante en prenant des photos et des vidéos.
− Maman ! Maman ! Peux-tu me prêter l'appareil s'il te plaît ?
− Que veux-tu faire avec ?
− Le lionceau là-bas, il marche, ce sont ses premiers pas.
La mère de Lola sortit le caméscope et le lui tendit avec un regard méfiant qui semblait lui dire «surtout prends en soin». La petite fille s'empressa de rejoindre la cage, appareil en main.
− Qu'il est beau, qu'il est beau ce p'tit lionceau ! Qu'il est beau, qu'il est beau ce p'tit lionceau !
Elle prit l'animal sous plusieurs angles et fut ravie du résultat obtenu. Le petit fauve s'avança vers elle. Il se colla contre les barreaux de sa cage et attendit qu'une main douce et pleine de réconfort se pose sur son museau. Ce fut un moment magique, elle caressa son pelage de ses petits doigts pleins de tendresse. Cet instant lui procura une forte sensation de bonheur. Dans un élan de panique sa maman hurla :
− Attention Lola ! Écarte-toi !
La fillette ne voyait pas pourquoi elle devait s'écarter car le petit animal lui paraissait bien inoffensif. Elle resta à ses côtés, ignorant les paroles de sa mère. Lola s'aperçut au tout dernier moment que le lionceau n'était pas seul dans sa cage. Surgissant de derrière un tas de paille, un énorme lion vint lui mordre le doigt. Elle se débattit de toutes ses forces, hurlant de douleur, et après une lutte acharnée, elle réussit à extraire son doigt de la grosse gueule du lion, indemne ! Il devait, sans doute, s’agir du père du petit. Après quelques minutes de soins, enveloppa simplement son doigt dans un pansement. Lola songea que le lion n'avait pas voulu lui arracher le doigt, mais seulement protéger son petit, car sinon il aurait déchiqueté sa main toute entière. Bien qu’il ne lui ait rien fait de grave, Lola n’aimait plus du tout cet animal agressif. Savoir que ce lionceau, dans quelques années, en ferait de même pour ses enfants, l’écœurait. Elle s'éloigna de la cage et reprit son chemin, entonnant gaiement :
− Qu'il fait mal, qu'il fait mal, cet animal ! Qu'il fait mal, qu'il fait mal, cet animal !
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